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Chat roux

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Il attend sur le rebord d'une fenêtre. Sans doute depuis longtemps, j'habite le quartier depuis quelques semaines et il est là. Le matin, le midi quand il m'arrive de rentrer, le soir.

Statufié je ne l'ai jamais vu bouger. Il doit y avoir un maître derrière la fenêtre, un homme une femme un enfant ou peut-être une vieille femme à chats.

 

Au début je n'y ai pas vraiment prêté attention, mais cela fait deux mois et il est toujours là immobile.

Il est roux, aucune trace d'une autre couleur, pas le moindre poil blanc, une grosse tête ronde, de loin pas moyen de voir la couleur des yeux toujours plissés.

Il me fait penser à ces énormes chats qui tournaient autour des arènes d'Arles dans les années 1970, des sortes de chats de guerre, plus gros, plus hauts que les autres, les maîtres de la rue.

Derrière la fenêtre je n'ai jamais remarqué un mouvement, les voilages ne bougent pas, pas d'ombre qui se glisserait devant, de coin tiré pour regarder dans la rue. La maison à deux étages, le rez de chaussée donne sur un jardin, enfin un truc en terre avec des plantes roussies, elles aussi.

Moi je mène mon train, un mot de ma grand-mère, elle m'a élevé. Bien élevé. Les parents étaient loin et ne me portaient que peu d'intérêt, tant mieux.

 

Je n'ai pas fait d'études brillantes, mais mon BTS informatique me permets de vivre. J'ai trouvé un job, une place, j'y suis bien. Je n'ai pas grand chose à dire de ce job, il me permet de vivre de payer mon appartement les sorties avec les amis. J'ai une copine, mais pour le moment elle n'a pas trouvé de job dans cette ville, de mon côté je cherche pour la rejoindre.

Des amis des sorties assez rares, chaque fois que je le peux, je vais passer du temps dans des coins perdus de campagne.

 

Je vais sur « Google maps », je me balade le long de petites routes et si le coin me plaît avec Claire ou seul je pars quelques jours et je me perds sur les sentiers les chemins, je vagabonde appareil photo à la main ou sans rien.

Au retour mon premier regard est toujours pour voir si le chat roux est là ou pas, il est toujours là, comme figé.

Les livres m'occupent pas mal aussi, si je n'ai pas de grande joie, je me sens bien dans une vie que j'ai choisie. Je n'ai pas envie de courir le monde, de parler des heures autour d'un ou plusieurs verres. Pas envie de cuites à s'arracher les tripes.

 

Cette semaine Claire vient passer quelques jours de vacances, je serai au boulot mais nous aurons du temps ensemble, nos nuits sont douces, nous aimons flâner dans les petites rues.

Ce matin elle m'accompagne au boulot, je ne suis pas sûr mais il me semble que le chat a cligné des yeux.

Le soir Claire me parle du chat, elle l'a vu rentrer dans l'appartement derrière la fenêtre, paisible, revenir.

Il est allé dans le jardin dans les herbes roussies.

Aussi sur le toit, donc ce chat n'est pas de porcelaine, il vit, a sans doute un maître ou une maîtresse qui s'occupe de lui. Pour moi quand je suis rentré il était à son poste. Immobile sphinx de gouttières.

Claire le voit toute la semaine, bouger agir parfois elle le croise dans la rue, un chat comme un autre, plus grand, gros que les autres c'est tout. Plus félin que les autres chats du quartier.

Ce fût une semaine agréable peuplée de bons moments, il est rare de pouvoir s'accorder ainsi avec « l'autre », ensemble c'est naturel. Bien sûr absente elle me manque, je sais lui manquer tout autant, mais ce sont des manques sans déchirure, sans solitude désespérante. Nous savons tous les deux que bientôt, nous serons dans le même ville sous le même toit.

 

Claire ce n'est pas une beauté à couper le souffle, mais il émane d'elle une tranquillité apaisante, Claire dit pareil de moi.

Nous avons besoin de peu.

Hier nous sommes allés le soir dans un restaurant. Le plaisir de la nourriture bien sûr, mais être là face à face dans ce lieu accueillant, parler livres, photos, balades.

Nous sommes des flâneurs, rien en nous du randonneur solitaire ou en bande. Pas d'exploit, pas de recherche du faire, faire le GR20 ou faire Stevenson, non juste marcher, se poser faire demi-tour quand nous le souhaitons. Se lever tôt pour voir le lever du soleil, attendre le soir patiemment pour son coucher. Marcher sous la pluie, ou la regarder tomber derrière une vitre un verre à la main. Lire avec le bruit de l'orage.

 

Claire est partie hier, le chat est à son poste matin et soir au long de ma semaine

Ce dimanche j'ai choisi de ne pas bouger. Bien que l'angle soit aigu, je peux voir le chat sur son appui de fenêtre, l'envie m'est venue de le voir bouger, vivre.

Le temps est clair, je me suis installé près de la fenêtre, un livre à la main. Je ne me suis jamais éloigné plus de dix minutes de la fenêtre, il n'a jamais bougé, ou il fût plus rapide que moi. Il attendait impassible. Mais attend-il vraiment ? Il peut aussi bien être là pour lui et regarder les passants, je suis un passant.

Si, il attend, il attend qui ou quoi. Pourquoi Claire l'a-t-elle vu ailleurs qu'à son poste ?

Pourquoi je parle de poste ?

Les journées défilent, je passe à la librairie ou à la bibliothèque chaque fois que je peux. J'ai besoin de ma ration quotidienne de mots. Romans, essais, j'aime lire, c'est mon plus vieux plaisir, un plaisir né dès l'enfance, pas de souvenir de moi sans livre. Au travail aussi pendant la pause déjeuner je préfère lire, je déjeune rarement avec mes collègues que ce soit dans la salle de repos ou dans un restaurant. Je préfère lire.

Hier j'ai lu dans le square au pied du bureau, il est tranquille, les bancs sont agréables et il y a un magnifique hêtre roux, la rue est calme peu passante, c'est presque un moment de nature. En lisant, je me suis senti inquiet, j'ai regardé autour de moi, et j'ai cru voir la silhouette du chat roux. J'ai repris ma lecture, mais j'avais du mal à suivre le fil des mots. De retour au bureau la sensation de malaise s'est apaisée.

Le soir le chat était là immobile les yeux plissés, presque sans regard, pourtant il regarde.

 

Dimanche de nouveau j'ai pensé reprendre ma veille de la semaine précédente, puis je me suis senti ridicule, j'ai mis des chaussures de marche, pris un bus qui m'emmène en trente minutes, (la ville est assez petite) dans un village où souvent les habitants viennent se balader, village médiéval. Je m'arrête rarement au village, je vais vers un sentier de randonnée et je marche quelques kilomètres.

Début de printemps, il y a encore des zones grises dans les arbres, d'autres sont plus ouverts le vert pointe un peu partout, primevères, violettes. Je sais tout cela paraît bien futile, un peu niais, mais je pense sincèrement que la nature, bien que travaillée par les humains est notre vraie univers, que ce lien au monde est le seul réel.

Pour Claire et moi cela complique un peu les choses, trouver du travail dans une petite ville est plus difficile que dans les grandes, trouver deux emplois est encore plus dur.

 

Le sentier traverse un bois, le fond du bois est humide, des anémones fleurissent je patauge un peu dans la boue par plaisir. Je prends des photos avec le macro, des lichens, des lumières sur des pierres, des riens.

Au retour j'ai un peu d'avance sur le bus, je sors un livre de ma poche. Chez moi je me sens en paix, comme à chaque fois après une balade une randonnée, je me demande comment faire pour vivre dans un département perdu dans le désert français.

Au matin sur le trottoir devant ma porte des empreintes de chat, grosses pattes pleines de boue.

Le chat est là au dessus du jardinet, il me regarde, enfin je le crois.

Je commence à me poser des questions, le chat m'intriguait jusqu'à maintenant. Je commence à avoir un peu peur. J'en parle avec Claire, je parle des traces de pattes, cela l'a fait rire, des chats il y en a plein ton quartier dit-elle. Alors des traces de pattes de chat après la pluie de cette nuit, rien d'anormal. J'ai souri au téléphone, pourtant il m'a semblé qu'il y avait un pétale d'anémone sauvage près des empreintes.

Je me fais sans doute des idées, mais un filet d'inquiétude apparaît dans mes pensées. Lorsque je croise le chat, impérial, sur son appui de fenêtre, je suis moins sûr de moi.

Pourtant il ne bouge pas, yeux plissés immobile impavide.

 

J'habite au deuxième étage d'un petit immeuble, une zone peu éloignée du centre, suffisamment pour que ce soit dans un quartier de maisons individuelles plus ou moins anciennes et entretenues, une des fenêtres donne sur la maison du chat à une centaine de mètres.

L'autre donne sur une de ces maisons, il y a là deux arbres centenaires deux énormes tilleuls, quand je suis tendu je me poste derrière celle-ci, me nourrit l'esprit de la puissance calme des arbres.

Je passe là de plus en plus de temps, ne pas être tenté d'aller voir si le chat roux est là ou pas.

 

Pour travailler, je prends un autre trajet, je pers un peu de temps, mais depuis, que je ne passe plus devant ce foutu chat roux, l'angoisse s'est dissipée, je respire mieux, en plus mon trajet passe entre des jardins, l'air est meilleur, mon pas plus léger. Je n'ai pas changé grand chose à ce que je vis, mais je vis mieux. Je respire mieux, le soir dans les livres je retrouve tout le plaisir des mots.

Je prends conscience du poids que cet bestiole faisait peser sur moi, ou de l'importance que je lui accordais, parce que je ne sais toujours pas si il me surveille ou si je m'imagine qu'il me surveille.

Cette histoire ressemble à mon mode de vie, de penser.

J'aime vivre, ce sais ce que j'aime dans cette vie, ce qui me porte, l'amour de Claire de la nature des arbres, et cette recherche du monde, des autres, de moi même au travers de toutes mes lectures, et de mes rencontres.

Bien que discret et peu bavard, je parle j'ai finis par me faire connaître de quelques uns.

Le matin je bois un café dans un des deux bistrots près du bureau. Ils m'ont vite adopté, d'abord par le silence, puis des sourires échangés, ensuite quelque mots.

J'ai fait de même chez les libraires, à la bibliothèque, dans mon petit immeuble, je ne suis plus une ombre, je suis celui dont on ne sait rien, ma voisine dit de moi que l'on ne connaît de moi que le bruit de mes clés le matin le soir.

 

Au travail des collègues me parlent de leurs soucis j'écoute, je n'ai pas de conseil à donner, j'écoute et surtout ils savent que je dirait rien, muet.

Quand par contre je suis dans la nature en train de flâner de me balader ou de lire au coin d'un pré d'un bois dans une clairière, là je ne supporte pas de parler avec qui que ce soit, je pars à la recherche du coin le plus éloigné possible de tout contact. Aucune envie d'échanger avec qui que ce soit sur le temps la dureté du chemin, la distance qu'il reste à parcourir avant le prochain gîte. Compostelle Stevenson me sortent par les yeux.

Les banalités les stupidités entendues m’horripilent me hérissent « Comme la nature est verdurée !  »

 

Un jour je me suis perdu. Avec Claire nous avions trouvé une petite clairière au cœur d'un bosquet, pour l'atteindre pas de chemin c'est la chance qui nous avait mené là, ou le hasard, la route était loin, la campagne paraissait déserte, juste au loin les toits d'une ferme qui reçoit parfois des convives, nous y avions déjeuné l'année précédente.

Ce que j'aime dans la campagne, c'est retourner dans les mêmes lieux, pour qui sait voir sentir, ils ont toujours du nouveau à offrir.

Dans la clairière nous avions fait l'amour en silence nus, sur cette herbe qui tapissent certains bois certaines forêt, un plaisir sans limite aucune retenue, sauf que nous ne voulions pas troubler ce moment du son de nos voix.

Ensuite j'avais ouvert le « Tao Te King » puis Claire m'a secoué légère par l'épaule.

« Tu as lu pendant deux heures et cela fait maintenant quatre heures que tu ne dis rien, tu es resté silencieux, parfois tu me souriais. Il y a eu pour nous deux ce long moment où au bord du Tarnon un grand lézard vert collé au tronc d'un saule rabougri nous regardait.

 

Cette vie me convient, mais au fond de moi collée comme une verrue, il y a une tristesse indicible qui ne me quitte pas, qui poisse mon regard, empoisonne certains moments quand elle suinte s'insinue dans mes pensées, une sensation étrange dans le corps, l'âme c'est elle.

Je pars à sa recherche en moi dans les livres, chez les poètes les philosophes. Maintenant elle a un nom, je la nomme le chat roux.

 

Ce matin je suis heureux je vais rejoindre Claire chez elle puis nous partons pour Meyruès, surtout le causse Méjean et le causse Noir, nous aimons ces petits pays qui sont un monde entier. Nous nous offrons un vrai luxe, loger quelques jours dans un hôtel luxueux, qui servait de relais pour les résistants. Nous y dormirons petit déjeunerons et dînerons pour le reste nous serons nus seront sur les plateaux isolés du monde.

Ce séjour m'a fait oublié et le chat roux et son double intérieur. Je suis rentré lavé apaisé. Pour aller au bureau inattentif j'ai repris mon chemin habituel, et il était là sur l'appui tout aussi immobile tout aussi inchangé, mais cette fois je l'ai senti ou imaginé menaçant.

Ou est-ce moi qui suis devenu friable ?

En tout cas la tristesse s'est réveillée elle aussi. Le chat est revenu la tristesse est revenue.

Garder ce que j'aime de la vie devient difficile, âpre. Au lieu de couler de source mes joies mes plaisirs, balades lectures, il me faut les sortir de la gangue de tristesse, de la crainte du chat roux.

Ce soir je suis allé voir les tilleuls du jardin d'à côté, le chat était au pied des arbres, le regard tourné vers moi aussi immobile que sur la fenêtre aussi impénétrable. Je ne regarde plus dehors, je ne regarde plus les arbres. J'ai installé samedi de lourds rideaux devant les fenêtres quand je rentre je les tire pour ne pas le voir, je ne les ouvre que le matin, sans regarder dehors.

De nouveau j'ai changé de trajet, je repars par des rues détournées, je rentre par ce même chemin, pour le moment il me laisse tranquille, mais je sais qu'il va me trouver que je vais devoir encore changer, qu'il me trouvera encore, que je changerai encore que mes trajets seront de plus en plus longs compliqués.

Je sens que Claire s'éloigne, je ne lui parle de rien, mais ses appels se font plus rares, plus distants, elle devait venir, nous avions prévu un passage vers le village médiéval, elle se dit en petite forme, fatiguée souhaite se reposer.

 

La tristesse, la chatte rousse en moi sait, elle sait. Nous savons que cela au moins ne vient pas de moi, non Claire a du trouver un autre amour plus proche sans doute.

Alors un soir je l'appelle je lui dit que j'ai compris, que je ne lui en veux pas, que s'aimer de loin est difficile, que si sa vie l'a tournée vers un autre que moi je comprends que je la regretterai, que je la regrette déjà, mais qu'elle doit partir si elle le souhaite.

Claire me dit que oui c'est cela, forte au début de notre appel c'est elle qui fond en larmes ensuite, qui entre ses sanglots souhaite m'expliquer.

Il n'y a rien à expliquer, c'est comme çà.

Oui Claire tu me manques, mais je préfère choisir la séparation que d'espérer, que de douter.

Que d'y croire de me faire croire qu'il faut que j'y crois. Que tout d'elle me manque, mais que je préfère le manque.

Que je préfère le manque et tous les souvenirs vécus ensemble, partagés, que de rafistoler une toile déchirée, dans ma vie la toile restera intacte. J'ai raccroché en lui disant Adieu.

 

Pendant plusieurs jours elle m'a envoyé des messages vocaux, écrits, je ne lisais pas je n'écoutais pas j'effaçais les messages pour ne pas effacer Claire de ma mémoire.

Un matin au réveil un reste de rêve « La tristesse a gagné, le chat aussi, tu ne t'es pas battu pour Claire. »

Comme je le présentais le chat me retrouve toujours quelque chemin que je prenne, il finit toujours par se retrouver sur ma route, en haut d'un muret, sur une branche, un jour il était devant mon bureau avant moi, une autre fois dans le square pendant ma pause assis sur le banc, volontairement je me suis installé sur le même banc, pas par provocation mais pour m'imposer, « Tu ne t'es pas battu ».

Alors je m'oppose je m'oppose à ma peur, à ma tristesse à la présence du chat roux, venimeux. Toute mon énergie pour trouver de nouveaux trajets, de nouveaux chemins, pour trouver la force de lire, de travailler, de veiller sur ce qui fait ma vie.

 

Demain je pars pour Florac, j'aime cette petite ville, en fait un gros village aux allures de ville, j'ai plaisir à roder dans les rues et les environs en plus le chat ne sort jamais de sa ville semble-t-il. La chatte en moi essaye bien de se manifester, de me faire douter, de me pourrir le séjour, mais ce n'est pas trop dur de s'opposer à elle à Florac.

Je vis, je vis encore, la lutte est quotidienne, un pacte s'est tissé entre le chat et moi, un pacte non dit, connus de nous deux. Il veux ma peau, je la garderai.

C'est à qui des deux s'essoufflera le premier. Je me suis juré que ne pas perdre.

 

Le temps passe, Claire est auprès de moi dans ma mémoire, il m'arrive de garder les rideaux ouverts. Le chat commence à mettre plus longtemps à me retrouver, je n'ose penser à une victoire, c'est peut-être une stratégie, des ruses. Je reste prudent. Il m'est plus difficile de contenir la tristesse intérieure la chatte rousse.

Hier en sortant un sac à dos pour mettre l'appareil photo et l'objectif choisi, j'ai trouvé dans une poche un paquet de cigarettes, celui de Claire. Elle l'avait mis là pendant une de nos balades, c'était il y a deux ans, un séjour en Ariège, vers Alos.

Une auberge perdue et déserte, à part nous, pas de client, et une belle cuite avec le directeur, une de ces cuites mémorables ou tout devient limpide, simple ou l'on tue sans regret la connerie humaine à coup de sentences, de philosophie profonde ou alcoolique, une cuite dont on se souvient par l'oubli qu'elle donne de la fin de soirée, une cuite qui évite la redescente, les regrets, les vomissements. Une cuite humour noir.

 

Le temps passe et rien ne chance, Claire est là dans ma mémoire, Elle reste vivante, je n'ai pas de nouvelle depuis trois ans, je n'en souhaite pas, la chat roux et moi jouons à chat, ou au chat et à la souris, il devient hésitant, je reste inquiet. Je résiste.

La nuit c'est la chatte rousse, la tristesse qui me guette, elle s'insinue dans mes rêves, la journée elle sourd, angoisse je résiste.

Cela va durer longtemps je le sens. Quand le moral baisse, quand le désir de céder se fait plus fort, je reprends, Le Tao Te King ou le Tchouang Tseu, Le Li Tseu, ou je pioche dans le rayon de poésie Chinoise, Merci Mr Chollet.

Je résiste je vis.

 

Par quel hasard Claire tomba-t-elle un jour sur ce journal, celui de la ville où vivait son ancien amant, devenue mère, elle ne l'avait pas oublié, mais sa vie ne lui faisait qu'une petite place au rayon nostalgie.

Jour de marché et les poireaux emballés dans une page du « Dauphiné ». Les préparant, elle lut :

Mort mystérieuse à « X ».

Le corps déchiqueté par des griffes de félin de Mr Y a été retrouvé ce matin à son domicile, sa voisine ne le voyant pas depuis plusieurs jours a alerté la police. Arrivés sur place les fonctionnaires n'ont pu que constater le décès.

Il semble qu'un animal chat ou félin plus gros se soit acharné sur Mr Alain Y avec une rage difficilement imaginable.

Le souci des officiers de police est que la porte était fermée de l'intérieur, qu'il n'y a aucune trace d'effraction, aucune trace de chat de félin de quelque espèce que ce soit.

Alain Y menait une vie tranquille depuis des années, homme secret, il était apprécié de ses collègues. Il était connu pour son plaisir de la marche, il pouvait marcher des heures, même pour arriver à son travail, semblait lire beaucoup, l'appartement regorge de livres.

Tout est propre, net dans cet appartement. Les murs sont couverts d'une très belle collection de photos de divers coins de France. Rien ne laisse espérer que les enquêteurs trouvent la cause et la raison de la mort de Monsieur Y. Personne ne lui connaît de relation, son téléphone est vide de numéro ou d'appel autre que professionnel, comme inutilisé depuis des années.

Une enquête de voisinage est en cours, qui semble décrire un homme aimable et discret, avec des habitudes tranquilles. Il est décrit avec toujours un livre à la main. Effacé et présent à la fois ne s'imposant jamais.

Jamais notre ville n'a connu de mort plus mystérieuse.

 

 

(Dominique Castanet)

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