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Absurde ivresse

bielleseulebleue.jpgJe l'aime tant le temps qui reste il me faut rester au milieu de ce monde qui fait tout ce qu'il ne faut pas et qui ne fait pas tout ce qu'il faudrait faire.
Les planturles se réfugient au sommet des arbres pour échapper aux chasseurs, le soir elles redescendent. Il faut dire que les planturles, en dehors de leur cri particulièrement désagréable, d'où leur nom, sont un mets savoureux pour qui sait les attraper et les accommoder.
La cuisson des planturles suppose une bonne connaissance des différents modes de préparation, un goût très fin pour apprécier les différentes origines qui vont influer sur les choix de maître. Un très bon nez, un sens aigu du mariage des saveurs. Et, inévitable, il est nécessaire d'être un vrai gourmand.
On dit qu'au Japon, un pays lointain de l'autre côté de l'on ne sait quelle mer ou quel océan, ils savourent un poisson particulier qui peut donner de grands bonheurs aux gastronomes ou la mort. Les planturles, elles, si elles sont travaillées par un maître donnent le plus grand bonheur aux gourmets, une jouissance inégalable dépassant de loin ce qu'un amant divin ou une maîtresse céleste peut offrir de plus suave, de plus doux, de plus hallucinant à son amour humain. Mal préparées mal traitées les planturles font mourir mais d'ennui, elles peuvent faire accroire que la purée toute prête est un plat savoureux.
Les amateurs de planturles sont capables d'affronter les plus grands dangers pour savourer leur mets préféré. Attention, ne pas croire que les amateurs de planturles ne se trouvent que parmi la bonne société ou sont des esthètes d'une espèce particulière, maîtres queux, ou foudres de dégustation.
Non, les amateurs de planturles sont des gens comme vous et moi, qui simplement sont nés dans une région où poussent les planturles.
Savoureuses, pour se défendre elles sont devenues des plantes épisodiques et migratrices, leur migration est courte, les racines transformées en pattes restent des racines pour se nourrir. La planturle doit bien se replanter chaque soir.
Une telle migration ne pouvant passer inaperçue, grimper aux arbres est largement insuffisant pour les protéger des chasseurs de planturles. Heureusement pour elles, les arbres en question sont couverts d'aiguilles monstrueuses situées sur toute la longueur de leur tronc. Ces épines dissuadent les chasseurs de grimper et permettent à l'espèce de survivre sans trop de difficultés face aux gourmets gourmands de leurs saveurs végétales.
Mais, me direz-vous, les chasseurs n'ont donc pas de souci particulier : il leur suffit d'être là le soir et de prendre les planturles au moment du retour. Que nenni, vous répondrai-je, et ceci pour une fort bonne raison : les planturles lorsqu'elles redescendent de leur perchoir épineux n'ont pu se nourrir correctement, encore que certains jours de pluie elles présentent meilleure mine que d'autres jours plus secs. Donc le soir, lorsque les planturles redescendent, elles sont à peine comestibles, il est nécessaire d'attendre le matin et un nouvel épisode pour pouvoir les chasser.
Au matin elles profitent de la pause publicitaire pour grimper aux acacias acérés : en effet les chasseurs de planturles ont un défaut, c'est leur extrême sensibilité aux messages publicitaires.
Enfin, la vie des planturles est difficile, celle des chasseurs également, mais la vie est ce qu'elle est, chacun doit s'en satisfaire bon an mal an, bon gré mal gré et tout ça.
Je tiens toutefois à préciser que sur cette île au sud de mon pays d'origine, il n'existe aucun chasseur de planturles qui ne fournit d'ailleurs aucun gourmet puisque personne ne connaît leur existence et que ces putains de plantes font tout un foin pour rien mais alors vraiment pour rien.
Le secret de cette histoire est sans doute que, mais je livre là un secret très important et je souhaite de tout coeur que l'humanité m'en soit reconnaissante un jour ou l'autre, prenons l'autre tant qu'à faire, le secret, disais-je, c'est que parfois Darwin buvait et buvait sec.

 

Dominique Castanet

 

 

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